Quand on parle de défiscalisation immobilière, on pense souvent, en premier lieu, à la loi Pinel. Poussé par les politiques, mis en avant par les promoteurs, ce dispositif dispose certes d’un atout séduisant : la promesse d’une belle réduction d’impôt en contrepartie de la mise en location du logement acquis. Or cet avantage fiscal, aussi attractif soit-il, ne doit pas masquer les contraintes associées au mécanisme Pinel, qui n’a pas été conçu exclusivement dans l’intérêt des investisseurs. Il est donc essentiel, avant de choisir l’option de l’investissement Pinel, de vous demander si ce dispositif est fait pour vous, en vous posant les bonnes questions.
Le bien immobilier que vous ciblez est-il adapté à un achat Pinel ?
Vous n’ignorez pas que la loi Pinel impose des contraintes quant au choix du logement : celui-ci doit être neuf (ou réhabilité) et situé dans l’une des zones « tendues ». C’est pourquoi l’emplacement du bien doit être sélectionné avec soin. Mais ce n’est pas tout : pour réussir son investissement locatif, il faut également tenir compte de contraintes cachées.
Car si l’idée d’acquérir un bien immobilier et de se faire rembourser 21 % du prix est séduisante sur le papier, il faut toutefois prêter attention à deux paramètres : son potentiel locatif et son prix d’achat.
- Le potentiel locatif dépend de l’attractivité de la zone où est situé le bien. Sauf qu’on aurait tort de penser que seul le zonage loi Pinel détermine la capacité d’un bien immobilier à être loué, zone tendue ou pas : au sein d’une commune dans laquelle le marché est globalement tendu, il y a forcément des secteurs moins demandés par les locataires. Il faut donc se poser la question du potentiel locatif dans le quartier ciblé, et pas seulement dans l’agglomération dans son ensemble.
- Le prix d’achat du logement peut excéder la moyenne du mètre carré dans le secteur choisi. Or quel est l’intérêt d’économiser 21 % sur le prix d’achat si le bien vous est vendu 25 % plus cher que les prix du marché ? Les programmes immobiliers neufs éligibles à la loi Pinel tiennent compte de l’atout représenté par la réduction fiscale : les prospectus des promoteurs soulignent cette possibilité. Le résultat, ce sont des prix souvent supérieurs à ceux du marché environnant. Payer un appartement neuf 400 000 € en Pinel au lieu de 300 000 € dans l’ancien sans défiscalisation n’aura donc qu’un intérêt limité, la différence de prix n’étant pas couverte par le montant de la réduction fiscale. Il faut s’assurer que la majoration reste de l’ordre du raisonnable.
La réduction d’impôt loi Pinel sera-t-elle utilisée à plein ?
Voilà LA question essentielle à se poser pour profiter pleinement de la loi Pinel. À ce titre, il faut apporter une précision : trop de contribuables confondent réduction et crédit d’impôt. Mais ces deux avantages fiscaux fonctionnent très différemment : autant le crédit est restitué au bénéficiaire quoi qu’il advienne, autant la réduction est soustraite de l’impôt, mais uniquement si impôt il y a ! De sorte que la réduction loi Pinel ne s’applique qu’à une situation où le ménage paie effectivement des impôts.
Prenons un exemple. À la suite d’un investissement en loi Pinel, vous bénéficiez d’une réduction de 36 000 € sur 6 ans, soit 6 000 € par an. Pour purger votre réduction en intégralité, vous devez donc payer au moins 6 000 € d’impôt par an. Si votre impôt est moindre, vous perdez une partie de la réduction. Si votre impôt est supérieur, la somme à verser à l’administration fiscale sera amputée de ce montant.
Mais attention, car le calcul doit tenir compte de la durée d’engagement ! Cet avantage fiscal court sur 6, 9 ou 12 ans. Qui peut dire quel impôt vous paierez dans quatre ou cinq ans ? Des événements personnels ou professionnels peuvent venir modifier votre revenu imposable : un mariage, une naissance, une baisse de revenus, un départ à la retraite… Et vous perdrez une partie de la réduction loi Pinel. Celle-ci n’étant pas reportable, c’est la rentabilité de votre projet locatif qui en prend un coup.
Voilà pourquoi les spécialistes vous diront que le dispositif Pinel s’adresse en priorité aux contribuables lourdement imposés, et non à ceux dont la réduction couvrira à peine l’impôt. C’est l’une des clés pour acheter efficacement en Pinel.
La mise en location du logement acheté sous le régime Pinel sera-t-elle rentable ?
En pensant aux possibilités offertes par la loi Pinel, on a souvent les yeux qui brillent en imaginant les économies d’impôt qu’on va réaliser… au point d’oublier tout le reste, et notamment les obligations qui pèsent sur le propriétaire du logement acquis en matière de loyer. Car celui-ci est plafonné.
Il faut avoir en tête que ce dispositif n’a pas seulement pour but d’élargir le parc locatif, mais aussi de donner une chance aux ménages modestes de pouvoir se loger. Or ce serait une grave erreur que d’omettre que sous la loi Pinel, les loyers maximum sont généralement situés 20 % en dessous du marché. Par exemple, pour un loyer fixé à 600 € sur le marché traditionnel, un logement Pinel sera plafonné à 480 €, soit une perte de 1 440 € par an.
Prenons un exemple plus concret. Imaginons que vous souhaitiez acheter un logement en loi Pinel à Lyon (zone A). Le loyer y est plafonné à 13,04 € du mètre carré (en 2021). Un appartement de 40 m2 devra donc être loué maximum 521,60 € par mois. Ce même appartement, proposé en dehors de tout avantage fiscal, se louerait 615 € dans le 8e arrondissement… mais aussi 800 € du côté de Perrache, ou 900 € dans le 1er arrondissement ! Ce qui veut dire qu’en fonction de l’emplacement, le manque à gagner sur le loyer peut s’avérer très important. Là encore, cela peut remettre en question la rentabilité de votre investissement.
En tout état de cause, il est peut-être plus intéressant d’investir dans un logement hors loi Pinel mais en ayant la possibilité de fixer le loyer de son choix !
Le bien immobilier pourra-t-il être revendu à bon prix ?
Enfin, un projet d’investissement en loi Pinel doit être confronté à la question de la revente. La possibilité de revendre le bien immobilier acquis en réalisant une plus-value fait pleinement partie de tout projet d’investissement locatif ; c’est même une part essentielle de la rentabilité.
Mais une fois l’avantage fiscal éteint, que vaudra l’appartement acheté sous le régime Pinel ? Pourrez-vous le revendre à un prix supérieur au montant que vous avez consenti à l’achat ? Ou même à un prix identique ? Le risque, c’est de se retrouver entouré de logements Pinel tous mis en vente au même moment, avec un impact certain sur leur valeur compte tenu du fait que leur principal atout (la défiscalisation) n’aura plus cours.
Bien sûr, tout dépend de la nature de votre projet d’investissement. Si vous avez l’intention de continuer à louer l’appartement au-delà de la période d’engagement, vous aurez l’avantage de pouvoir fixer le loyer de votre choix (dans la limite des contraintes imposées par la commune en matière de relocation). Mais cette question doit être prise en compte dans votre calcul de rentabilité.
L’investissement en loi Pinel n’est pas adapté à tous les profils. Il convient surtout aux contribuables fortement imposés, et nécessite de tenir compte de nombreuses contraintes en termes d’emplacement et de calcul de rentabilité. Il ne faut donc pas considérer uniquement la réduction d’impôt mais envisager un tel projet dans sa globalité – quitte à s’orienter vers l’achat d’un bien ancien avec travaux, offrant potentiellement un meilleur rendement. À vous de prendre en compte toutes les variables !